• MOT DU METTEUR EN SCENE

    Avec le recul, l'idée d'adapter pour la scène... et en musique, le texte qui nous restitue le chemin que Moïse fit de sa naissance jusqu'au Mont Sinaï, où il délivra à son peuple les dix Paroles de "Celui qui fut, est et sera", m'apparaît comme le parcours cers une utopie absolue.

    Comment oser, en effet, mettre en scène cet épisode du Livre sans une bonne dose d'insouciance et de naïveté ? Comment oser se mesurer à un texte mille fois traduit, mille fois adapté, mille fois commenté. Un texte qui est le socle de la culture monothéiste, la base de nos lois universelles.

    Et pourtant depuis le début, aucun de nous, jamais, n'a hésité, n'a flanché. Et le spectacle est là. Là, depuis des mois, pour des années sans doute et, je l'espère, bientôt dans de multiples pays.

    "Les Dix Commandements" porte l'émotion dont tous, chanteurs, danseurs, musiciens, chorégraphes, costumiers, perruquiers et techniciens de la troupe, nous avons pris conscience lorsque pour la première fois en Juillet 2000, dans la cour de récréation d'un lycée parisien nous avons débuté les répétitions.

    Le décor était tracé sur le sol à la craie, les statues égyptiennes étaient figurées par des chaises d'écoliers, le trône de Pharaon par un pupitre et les lumières étaient celles du chaud soleil de Juillet. Il pleuvait parfois et comme des écoliers, nous nous réfugiions sous le préau attendant que l'ondée passe, profitant de cette intimité particulière pour mieux nous connaître. Musulmans, Juifs, Chrétiens et les autres, venant de toutes les cultures issues du Livre, nous avons été, je le crois, sans en prendre consicence, transcendés par ce texte fondateur profondément enraciné dans nos mémoires et dans nos gènes. Si profondément parfois que pour beaucoup d'entre nous, il était dissimulé, comme sorti de nos mémoires.

    Il était tôt le matin de la première répétition et ils étaient là, un peu tremblant, à s'observer les uns les autres, prenant conscience tout à coup de "l'énormité" du projet en écoutant les premières chansons du spectacle "...Je laisse à l'abandon, Il s'appellara Moïse...". Et pendant que j'expliquais ma vision de l'adaptation (coeur serré, moi aussi) je pouvais lire dans les yeux de ceux que je ne connaissais pas bien encore et qui allaient devenir mais amis, la découverte du poids de la responsabilité qui allait leur incomber.

    Leur diversité était dans leur nom, Ahmed, Daniel, Pablo, Aziz, Lisbeth et les autres ; et dans leur nom, déjà était le sens que je voulais donner à notre "comédie musicale".

    Tu es Moïse, tu es Myriam, toi Ramsès, et toi Seti. Tu es Aaron, Josué, toi Bithia et toi Néfertari. Tu es Yokebed. Vous les Egyptiens et vous les Hébreux. Vous allez vous haïr, vous combattre pour enfin vous aimer et mieux vous comprendre. Apprendre que dans le Livre et les Paroles qui nous ont été données sur le Mont Sinaï, il n'y a pas de place pour la haine.

    Vous allez, au plus profond de vous-même, saisir et éclairer pourquoi, même en vous mesurant les uns aux autres dans l'exemplarité d'une démonstration voulue par l'Eternel, vous êtes et serez toujours des frères et des soeurs, tous issus du lit d'Abraham, tous enfants du feu de l'Alliance.

    Le chant et la danse peuvent aussi servir à ça.

    Elie Chouraqui


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